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30 mars 2013, Petersbach
Roman
On n'est pas sérieux, quand on a dix-sept ans.
- Un beau soir, foin des bocks et de la limonade,
Des cafés tapageurs aux lustres éclatants !
- On va sous les tilleuls verts de la promenade.
Les tilleuls sentent bons dans les bons soirs de juin !
L'air est parfois si doux, qu'on ferme la paupière ;
Le vent chargé de bruits, - la ville n'est pas loin, -
A des parfums de vigne et des parfums de bière …
Voilà qu'on aperçoit un tout petit chiffon
D'azur sombre, encadré d'une petite branche,
Piqué d'une mauvaise étoile, qui se fond
Avec de doux frissons, petite et toute blanche …
Nuit de juin ! Dix-sept ans ! - On se laisse griser.
La sève est du champagne et vous monte à la tête ...
On divague ; on se sent aux lèvres un baiser
Qui palpite là, comme une petite bête …
Le coeur fou Robinsonne à travers les romans,
- Lorsque, dans la clarté d'un pâle réverbère,
Passe une demoiselle aux petits airs charmants,
Sous l'ombre du faux-col effrayant de son père …
Et, comme elle vous trouve immensément naïf,
Tout en faisant trotter ses petites bottines,
Elle se tourne, alerte et d'un mouvement vif ...
- Sur vos lèvres alors meurent les cavatines ...
Vous êtes amoureux. Loué jusqu'au mois d'août.
Vous êtes amoureux. - Vos sonnets la font rire.
Tous vos amis s'en vont, vous êtes mauvais goût.
- Puis l'adorée, un soir, a daigné vous écrire ... !
- Ce soir-là, ... - vous entrez aux cafés éclatants,
Vous demandez des bocks ou de la limonade ...
- On n'est pas sérieux, quand on a dix-sept ans
Et qu'on a des tilleuls verts sur la promenade
Arthur Rimbaud, 1870.
Aujourd'hui c'est l'anniversaire de R. Pas de trêve pourtant dans nos petites querelles quotidiennes... Ce matin, je n'ai encore pas pu m'empêcher de m'agacer de le voir sauter sur l'ordi dès son réveil. Je me raisonne, je sais qu'il est intelligent, qu'il s'intéresse à des tas de choses et que je n'ai pas besoin de me faire de soucis, même s'il n'est pas acharné au travail, même si les deux épreuves anticipées du bac, cette année, en français et en histoire-géo, ça ne va pas être de la tarte, même si je pense qu'il peut mieux... Parfois son agressivité me déconcerte; j'admire sa culture, la fidélité de ses amitiés; j'ai souvent peur de mal le connaître; je comprends sa soif d'indépendance. J'aime quand il se confie un peu, je me hérisse quand je découvre qu'il nous a caché quelque chose (je crois que j'ai trop souffert, ado, de ne pas savoir dire, affronter, la vérité, souvent!), mais c'est bien rare, faut bien le dire (je parle ici de choses qui me concernent bien évidemment, car je respecte son jardin secret... bien que parfois, j'aimerais trop être une petite souris!... bien que parfois j'ai peur qu'il souffre ou qu'il fasse souffrir, difficiles souvent les amours adolescentes... ). Souvent je suis triste de le sentir absent, j'ai l'impression que son enveloppe est là (oui, celle qui mange, qui dévale les escaliers tôt le matin, qui ferme bruyamment les portes tard le soir et qui salit du linge!!!), mais qu'au fond, lui non... Je savoure les rares moments où l'on discute, où l'on échange. J'aime quand il est tendre (avec sa môman! ou avec les petits); je souffre des disputes, souvent violentes, avec P. Il aime la ville et espère bien rester à Paris après le lycée, ou bien à l'étranger. Aujourd'hui il a 17 ans et son grand père lui a envoyé ce poème (qui pourrait d'ailleurs faire partie de son programme du Bac!)...
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